Page:Curwood - Le Piège d’or, trad. Postif et Gruyer, 1930.djvu/19

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éternelle des vents, l’eussent fait fuir loin du lieu où il se trouvait.

« Je le jure ! » répéta Pierre.

Le visage de Philip s’était animé et le sang, qui y affluait, lui brûlait les joues. Il étendit ses poings sur la table et les crispa nerveusement. C’était un homme de trente-cinq ans. Il était, comme Pierre, svelte et bien découplé. Mais ses yeux, d’un bleu d’acier, étaient aussi clairs que ceux de Pierre étaient noirs. Il avait été un temps, déjà lointain, où il portait le costume de tous les gens civilisés, dans la grande ville où il vivait. Maintenant, il était vêtu de peau de caribou, avec des manches effrangées, ses mains étaient noueuses, et, sur sa face, vents et tempêtes avaient creusé des rides.

« C’est impossible, répliqua-t-il, Bram Johnson est mort.

— Il est vivant, m’sieu ! »

La voix de Pierre eut un tremblement étrange.

« Si je vous parlais par ouï-dire, si je n’avais pas vu moi-même, alors, m’sieu, vous pourriez douter. »

Ses yeux brillaient d’un feu sombre. Il éleva la voix, pour poursuivre :

« J’étais ici, comme nous sommes, lorsque j’ai entendu les cris de la horde. Alors je suis allé vers la porte et, l’ayant ouverte, je suis demeuré debout, à écouter dans la nuit, en cher-