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L’ŒUVRE DE RICHARD WAGNER À PARIS

prudence jusqu’à attendre huit ans avant d’accorder à Wagner une place sur ses programmes. Il s’efforça du moins de choisir des pages neuves. Telle, la « Chevauchée des Valkyries », qui devait prendre rang parmi ses succès les plus répétés (1881) ; tel le prélude et la finale de Tristan, amalgamés suivant l’usage. Il avait commencé, en 1880, par les ouvertures de Tannhaeuser et du Vaisseau fantôme, sans oublier « Siegfried-idyll ».

C’est du reste une étape nouvelle que marquent ces années-là, dans cette chronique de Wagner au concert, mais bien moins parce que Colonne avait enfin pris son parti, que parce que Charles Lamoureux entrait à son tour dans l’arène, en fondant, au théâtre du Château-d’eau, ses « Nouveaux Concerts ». Certes, le Cirque d’hiver continua, et avec plus de zèle que jamais, de vibrer aux accents d’importantes pages symphoniques ou lyriques, anciennes ou nouvelles ; et le vaste théâtre du Châtelet n’en attira pas moins la foule croissante des dilettantes à ses exécutions très vivantes, très chaleureuses. Mais au Château-d’eau et plus tard à l’Eden, puis au Cirque d’été, il y avait vraiment quelque chose d’à part. Sous l’inspiration d’un chef sévère, exigeant, mais essentiellement imprégné de l’esprit wagnérien, et qui inspirait, par son autorité même, une confiance toute particulière à ses auditeurs comme à ses musiciens, les œuvres qu’on croyait le mieux connaître apparaissaient sous un jour nouveau, évoquaient des impressions plus émouvantes, faisaient comprendre aux indécis de bonne foi, avec la pensée du maître, la raison d’être et la beauté de ce qu’elle apportait de neuf.

On sent très bien ce revirement d’opinion dans les articles du temps, ceux du moins que dictait une vraie conscience. On n’avait