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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/164

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mes voyages ne m’a plus intéressé que la diversité de mesure dans la dispensation de la lumière aux différentes parties du globe. À la fin de l’année tous les points de la terre ont vu le soleil pendant un même nombre d’heures ; mais quelle différence entre les journées ! quelle variété de température et de couleurs ! Le soleil, dont les feux tombent d’à-plomb sur la terre, et le soleil qui ne donne que des rayons obliques, n’est pas le même astre, du moins à en juger par les effets.

Pour moi, dont la vie tient de celle des plantes, je reconnais qu’il y a une sorte de fatalité dans les latitudes, et j’accorde volontiers à la théorie de Montesquieu un respect motivé par l’influence que le ciel exerce sur ma pensée. Mon humeur et mes facultés sont tellement soumises à l’action du climat, que je ne puis douter de ses résultats sur la politique. Seulement, le génie de Montesquieu a poussé trop loin les conséquences d’une action, réelle en certains cas, mais exagérée par le système de l’écrivain. L’écueil de la supériorité c’est l’opiniâtreté : ces grands esprits ne voient que ce qu’ils veulent ; le monde est en eux ; ils comprennent tout, hors ce qu’on leur dit.

Depuis une heure environ, j’ai vu le soleil s’enfoncer dans la mer, entre le nord-nord-ouest et le nord ; il a laissé derrière lui une longue traînée lumineuse qui suffit encore pour m’éclairer à l’heure qu’il