Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/222

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convenu, il rentre inopinément dans la salle par une porte secrète, se jette sur le téméraire étranger et le poignarde !…

« L’ordre avait été donné d’égorger en même temps jusqu’au dernier homme de l’équipage : le silence un instant troublé par tant de meurtres recommence à régner dans ce repaire. Mais le gouverneur de l’enfant avait tout entendu : il écoute encore … il ne distingue plus que les pas du baron et le ronflement des corsaires roulés dans leur peau de mouton et couchés sur les marches de la tour.

« Le baron, inquiet et soupçonneux, rentre dans la chambre de cet homme qu’il examine longtemps avec une attention scrupuleuse ; debout, près du lit, le poignard encore sanglant à la main, il épie les moindres signes qui pourraient trahir la feinte : à la fin, il le croit profondément endormi et se décide à le laisser vivre. La perfection dans le mal est aussi rare qu’en toute autre chose, » nous dit le prince K***, en interrompant sa narration.

Nous gardions le silence, car nous étions impatients de savoir la fin de l’histoire ; il continue :

« Les soupçons de ce gouverneur étaient éveillés depuis longtemps ; sitôt que les premiers mots du capitaine hollandais étaient arrivés à son oreille, il s’était relevé pour être témoin du meurtre, dont il vit toutes les circonstances à travers les fentes de la