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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/223

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porte, fermée à clef par le baron. Il eut, l’instant d’après, comme vous venez de le voir, assez de sang-froid pour tromper l’assassin et pour sauver sa vie. Resté seul enfin, il se lève et s’habille malgré la fièvre, il descend par une fenêtre avec des cordes, détache un canot qu’il trouve amarré au pied du rempart, pousse l’esquif en mer, le dirige à lui seul vers le continent, et gagne la terre sans accident : à peine débarqué il va dénoncer le coupable dans la ville la plus voisine.

« L’absence du malade est bientôt remarquée au château de Dago ; le baron, aveuglé par le vertige du crime, pense d’abord que le gouverneur de son fils s’est jeté à la mer dans un accès de fièvre chaude ; tout occupé à faire chercher le corps, il ne songe pas à fuir. Cependant la corde attachée à la fenêtre, le canot disparu, étaient des preuves irrécusables de l’évasion. Le brigand, cédant tardivement à l’évidence, allait songer à sa sûreté, quand il se vit assiégé par des troupes envoyées contre lui. C’était le lendemain du dernier massacre : un moment il voulut se défendre : mais trahi par son monde, il fut pris et conduit à Saint-Pétersbourg où l’Empereur Paul le condamna aux travaux forcés à perpétuité. Il est mort en Sibérie.

« Telle fut la triste fin d’un homme qui, par le charme de son esprit, la grâce et l’élégance de ses