Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/355

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envoyé chercher le médecin à la résidence habituelle de son prince, on ne l’y trouve pas, que devient votre espoir ? « M. le docteur n’est point ici. » Vous ne pouvez obtenir d’autre réponse ; quel parti prendre ? vous informer ailleurs ? Mais en Russie tout est matière à silence, tout sert à montrer la vertu favorite du pays : la réserve ; l’occasion de passer pour discret est une bonne fortune. Quel Russe ne voudrait la saisir, et négligerait de se faire valoir à si peu de frais ? On doit ignorer les projets et la marche des grands ou des gens attachés à leur personne par un emploi de confiance tel que celui de médecin ; tout ce qu’il ne leur plaît pas d’en faire connaître officiellement doit rester secret. Ici le mystère tient lieu de mérite : si vous avez été éconduit par une première réponse évasive, gardez-vous donc de revenir à la charge et de recommencer vos questions. Vous êtes malade ? c’est bon : ou vous guérirez tout seul, ou vous mourrez, ou vous attendrez le retour de votre médecin.

Au surplus, le plus habile de ces docteurs de princes est encore fort inférieur au dernier de nos médecins d’hôpitaux ; les plus savants professeurs ne tardent pas à se rouiller quand ils passent leur vie dans une cour. La cour a beau tenir lieu de tout à Pétersbourg, rien ne remplace, pour le praticien, l’expérience qu’il acquiert au lit du malade. Je lirais avec un vif intérêt