Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/418

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a peut-être du tact, il ne veut pas faire événement, et sans doute il n’attend que le moment où se lèvera l’Empereur pour aller à lui et pour lui adresser un mot d’explication. Point du tout !… À peine le souper fini, mon homme, loin de s’excuser, semble trouver tout naturel l’honneur qu’il vient de recevoir. Le soir, en rentrant chez lui, il aura mis tout bonnement sur son journal « souper avec l’Empereur. » Néanmoins, Sa Majesté abrégea le plaisir ; et, se levant avant les personnes placées à la grande table, elle se mit à se promener derrière nous, tout en exigeant qu’on restât assis. Le grand-duc héritier accompagnait son père : j’ai vu ce jeune prince s’arrêter debout derrière la chaise d’un grand seigneur anglais, le marquis***, et plaisanter avec le jeune lord***, fils de ce même marquis. Ces étrangers, restant assis comme tout le monde devant le prince et devant l’Empereur, leur répondaient le dos tourné et continuaient de manger.

Cet échantillon de la politesse anglaise vous prouve que l’Empereur de Russie a plus de simplicité dans les manières que n’en ont bien des particuliers maîtres de maison.

Je ne m’attendais guère à éprouver dans ce bal un plaisir tout à fait étranger aux personnes et aux objets qui m’entouraient ; je veux parler de l’impression que m’ont toujours causée les grands phénomènes de