Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/82

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Toutes choses bien calculées, bien combinées, on prit jour pour l’exécution. Ce jour avait été choisi par Louise, d’après l’humeur et le caractère des municipaux de garde, qu’elle connaissait tous, et dont quelques-uns lui paraissaient moins redoutables que les autres ; il tomba justement sur l’avant-veille de celui où mon père devait être conduit à la Conciergerie et de là au tribunal, c’est-à-dire à la mort : on était au mois de janvier 1794.

La veille de ce jour solennel on crut devoir faire une répétition dans la chambre de mon père, où les habillements de chacune des trois personnes qui allaient jouer leur rôle dans la scène du lendemain furent essayés avec un soin minutieux.

Ma mère rentra chez elle pleine d’espérance : elle ne devait revenir à la prison que le jour suivant vers le soir, et une heure seulement avant d’en sortir avec mon père.

Les atrocités politiques se multipliaient : la veille même du jour choisi pour l’évasion, la Convention décréta la peine de mort contre quiconque favoriserait la fuite d’un prisonnier politique. La loi disait qu’on poursuivrait avec une égale rigueur le complice et le recéleur ; enfin, vous aurez peine à le croire, elle condamnait à la même punition que les coupables tous ceux qui ne les auraient pas dénoncés !…

Le journal dans lequel cette loi monstrueuse fut