Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/155

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sont introduits pêle-mêle dans les grands appartements. Pour les hommes, excepté les mougiks en habit national, et les marchands qui portent le cafetan, le tabarro, manteau vénitien par-dessus l’uniforme, est de rigueur, parce que cette fête s’appelle un bal masqué.

Vous attendez là pendant assez longtemps, pressé par la foule, l’apparition de l’Empereur et de la famille Impériale. Dès que le maître, ce soleil du palais, commence à poindre, l’espace s’ouvre devant lui ; suivi de son noble cortége, il traverse librement et sans même être effleuré par la foule, des salles où l’instant d’auparavant on n’aurait pas cru pouvoir laisser pénétrer une seule personne de plus. Aussitôt que Sa Majesté a disparu, le flot des paysans se referme derrière elle. C’est toujours l’effet du sillage après le passage d’un vaisseau.

La noble figure de Nicolas, dont la tête domine toutes les têtes, imprime le respect à cette mer agitée, c’est le Neptune de Virgile ; on ne saurait être plus Empereur qu’il ne l’est. Il danse pendant deux ou trois heures de suite des polonaises avec des dames de sa famille et de sa cour. Cette danse était autrefois une marche cadencée et cérémonieuse : aujourd’hui, c’est tout bonnement une promenade au son des instruments. L’Empereur et son cortége serpentent d’une manière surprenante au milieu de la foule, qui,