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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/232

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peut dire à l’Europe : J’ai eu mon poëte !!!… et j’ai l’honneur de le pleurer !

« L’Empereur, l’homme de la Russie qui connaît le mieux les Russes, et qui se connaît le mieux en flatterie, n’a garde de ne point prendre part à l’affliction publique ; il ordonne un service : je ne sais même pas s’il ne porte point la coquetterie pieuse jusqu’à se rendre en personne à cette cérémonie, afin de publier ses regrets en prenant Dieu même à témoin de son admiration pour le génie national enlevé trop tôt à sa gloire.

« Quoi qu’il en soit, la sympathie du maître flatte si bien l’esprit moscovite qu’il réveille un généreux patriotisme dans le cœur d’un jeune homme doué de beaucoup de talent ; ce poëte trop crédule s’enthousiasme pour l’acte d’auguste protection accordée au premier des arts, et le voilà qui s’enhardit au point de se croire inspiré ! dans l’expansion naïve de sa reconnaissance, il ose même écrire une ode,… admirez l’audace !… une ode patriotique pour remercier l’Empereur de se faire le protecteur des lettres ! Il finit cette pièce remarquable en chantant les louanges du poëte évanoui : rien de plus… J’ai lu ces vers, et je puis vous attester les innocentes intentions de l’auteur ; à moins que vous ne lui fassiez un crime de cacher dans le fond de son cœur une espérance bien permise, ce me semble, à une jeune imagination. J’ai cru