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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/239

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L’étude des langues anciennes, à la mode autrefois, loin d’avoir un fâcheux résultat, nous donnait les seuls moyens d’arriver à une connaissance approfondie de la nôtre qui en dérive. Cette étude qui nous faisait remonter à notre source, nous fortifiait dans notre naturel, sans compter qu’elle était la plus appropriée aux facultés et aux besoins de l’enfance.

Tandis que la Russie régénérée lentement par le souverain qui la gouverne aujourd’hui d’après des principes méconnus des anciens chefs de ce pays, espère une langue, des poëtes et des prosateurs, les gens élégants et soi-disant éclairés chez nous, préparent à la France une génération d’écrivains imitateurs et de femmes sans indépendance d’esprit qui entendront si bien Shakspeare et Goëthe dans l’original, qu’ils n’apprécieront plus la prose de Bossuet et de Chateaubriand, ni la poésie ailée de Hugo, ni les périodes de Racine, ni l’originalité, ni la franchise de Molière et de la Fontaine, ni l’esprit, le goût de madame de Sévigné, ni le sentiment ni la divine harmonie de Lamartine ! Voilà comme on les aura rendus incapables de rien produire d’assez original pour continuer la gloire de leur langue, et pour forcer comme autrefois les hommes des autres pays de venir en France étudier les mystères du goût.


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