Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/250

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ces en faveur du despotisme. Qu’on accorde pendant vingt-quatre heures la liberté de la presse à la Russie, ce que vous apprendrez vous fera reculer d’horreur. Le silence est indispensable à l’oppression. Sous un gouvernement absolu il est telle indiscrétion qui équivaut à un crime de haute trahison.

S’il se trouve parmi les Russes de meilleurs diplomates que chez les peuples les plus avancés en civilisation, c’est que nos journaux les avertissent de tout ce qui se passe et se projette chez nous, et qu’au lieu de leur déguiser nos faiblesses avec prudence, nous les leur révélons avec passion tous les matins, tandis qu’au contraire leur politique byzantine, travaillant dans l’ombre, nous cache soigneusement ce qu’on pense, ce qu’on fait et ce qu’on craint chez eux. Nous marchons au grand jour, ils avancent à couvert : la partie n’est pas égale. L’ignorance où ils nous laissent nous aveugle ; notre sincérité les éclaire ; nous avons la faiblesse du bavardage, ils ont la force du secret : voilà surtout ce qui fait leur habileté.