Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/294

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t-on de toutes parts. Le cercle se rompt de nouveau et se disperse ; les bourreaux fuient devant un fantôme !… La cruauté s’allie volontiers à la superstition.

Pourtant quelques forcenés arrêtent les fuyards… « Revenez, revenez ; c’est elle-même ; c’est Xenie ; elle n’est pas morte !!

— Arrêtez ! arrêtez ! s’écrie une voix de femme, dont l’accent déchirant retentit dans tous les cœurs, mais surtout dans celui de Fedor… Laissez-moi passer, je veux les voir !! c’est mon père ! c’est mon frère !… Vous ne m’empêcherez pas de mourir avec eux. »

En achevant ces mots Xenie, échevelée, vient tomber expirante aux pieds de Fedor. Le malheureux jeune homme, immobile à force de saisissement était devenu insensible à ses liens.

On sent le besoin d’abréger les détails de cette horrible scène. Elle fut longue : nous la décrirons en peu de mots ; nous la décrirons pourtant, car nous sommes en Russie. Nous demandons grâce d’avance pour ce qu’il nous reste à peindre.

Xenie, dans la cabane où nous l’avions abandonnée, s’était d’abord laissé persuader de se taire, de peur d’aggraver le danger que courait Fedor, qui perdrait toute mesure et toute retenue s’il la voyait dans les mains des assassins ; elle craignait aussi d’ex-