Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/342

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fuyez-en donc la vue ; le soleil vous manque, vivez aux flambeaux ; des fortifications et des casemates ou tout au moins des passages fermés, des galeries closes vous seraient plus utiles que des promenoirs à découvert. Avec votre architecture méridionale vous affichez une prétention au beau climat qui me rend vos pluies et vos vents de l’été plus insupportables, sans parler des aiguilles de glace qu’on respire sur vos magnifiques perrons pendant vos interminables hivers.

Les quais de Pétersbourg sont une des plus belles choses de l’Europe : pourquoi ? parce que le luxe est là dans la solidité. Des blocs de granit apportés dans un bas-fond pour y suppléer la terre, l’éternité du marbre opposée à la puissance de destruction du froid, me donnent l’idée d’une force et d’une grandeur intelligentes. Pétersbourg est en même temps garanti contre la Néva et orné par les magnifiques parapets dont on a bordé cette rivière. Le sol nous manque, nous ferons un pavé de rocs pour porter notre capitale : cent mille hommes y mourront à la peine ! peu nous importe ; nous aurons une ville européenne et le renom d’un grand peuple. Ici, tout en déplorant l’inhumanité qui préside à cette gloire, je permets qu’on admire, et j’admire moi-même quoiqu’à regret !… J’admire encore quelques-uns des points de vue dont on jouit devant le Palais d’hiver. Ce palais est bâti dans ce qu’on appelle l’île de