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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/384

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couvert. Dans ces moments, heureusement fort rares, les habitants de Schlusselbourg savent que Pétersbourg est sous l’eau, et ils attendent d’heure en heure le récit de la nouvelle catastrophe. Ce récit n’a jamais manqué de leur arriver le lendemain, parce que le même vent d’ouest qui repousse les eaux du lac Ladoga, et met à sec la Néva près de sa source, fait refluer, lorsqu’il est violent, les eaux du golfe de Finlande dans l’embouchure de la Néva. Aussitôt le cours de cette rivière s’arrête : et l’eau trouvant le passage barré par la mer, rebrousse chemin en débordant sur Pétersbourg et sur les environs.

Quand j’eus bien admiré le site de Schlusselbourg, bien vanté cette curiosité naturelle, bien contemplé avec la lunette d’approche la position de la batterie placée par Pierre le Grand pour bombarder le château fort des Suédois, enfin bien admiré tout ce qui ne m’intéressait guère : « Allons voir l’intérieur de la forteresse, dis-je de l’air du monde le plus dégagé : elle est dans un site qui me paraît bien pittoresque, » ajoutai-je un peu moins adroitement, car c’est surtout en fait de finesse qu’il ne faut rien de trop. Le Russe jeta sur moi un regard scrutateur dont je sentis toute la portée ; le mathématicien devenu diplomate, reprit :

« Cette forteresse n’a rien de curieux pour un étranger, monsieur.