Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/387

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d’église ! Les quatre chapes qui furent solennellement déployées devant moi ont coûté trente mille roubles, à ce que le commandant a pris la peine de me dire lui-même. Las de tant de simagrées, j’ai parlé tout simplement du tombeau d’Ivan VI ; à cela on a répondu en me montrant une brèche faite aux murailles par le canon du Czar Pierre, lorsqu’il assiégeait en personne la forteresse suédoise, la clef de la Baltique.

« Le tombeau d’Ivan, ai-je repris, sans me déconcerter, où est-il ?. » Cette fois on m’a mené derrière l’église, près d’un rosier du Bengale : « Il est ici, » m’a-t-on dit.

Je conclus que les victimes n’ont pas de tombeau en Russie.

« Et la chambre d’Ivan ? » poursuivis-je avec des instances qui devaient paraître aussi singulières à mes hôtes que l’étaient pour moi leurs scrupules, leurs réticences et leurs tergiversations.

L’ingénieur me répondit à demi-voix qu’on ne pouvait pas montrer la chambre d’Ivan, parce qu’elle était dans une des parties de la forteresse actuellement occupée par des prisonniers d’État.

L’excuse me parut légitime, je m’y attendais ; mais ce qui me surprit, ce fut la colère du commandant de la place ; soit qu’il entendît le français mieux qu’il ne le parlait, soit qu’il eût voulu me tromper