Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/401

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écluses il s’annulait absolument chez lui, et laissait sa belle-mère faire les honneurs de sa maison avec la grâce dont vous avez pu juger.

À six heures du soir, mes hôtes et moi, avec un contentement réciproque et non dissimulé, il faut l’avouer, nous prîmes congé les uns des autres, et je partis pour le château de***, où j’étais attendu.

La franchise de ces bourgeoises m’avait raccommodé avec les minauderies de certaines grandes dames ; tout vaut mieux qu’une sincérité déplaisante. On espère triompher de l’affectation ; le naturel désagréable est invincible.

Tel fut mon début dans les classes moyennes, et tel fut le premier essai que je fis de cette hospitalité russe tant vantée en Europe.

Il faisait encore jour quand j’arrivai à ***, qui n’est qu’à six ou huit lieues de Schlusselbourg ; je passai là le reste de la soirée à me promener au crépuscule dans un jardin fort beau pour le pays, à voguer en petit bateau sur la Néva et surtout à jouir de l’élégante et gracieuse conversation d’une personne du grand monde. J’avais besoin de cette diversion aux souvenirs de la politesse ou plutôt de l’impolitesse bourgeoise que je venais d’essuyer. J’appris dans cette journée qu’en fait de prétentions les pires ne sont pas les plus mal fondées, car toutes celles dont on m’avait fait souffrir étaient justifiées ;