Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/36

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de cet espion officieux, je me mets à vous écrire.

Le prince Troubetzkoï fut condamné aux galères il y a quatorze ans ; jeune alors il venait de prendre une part très-active à la révolte du 14 décembre.

Il s’agissait de tromper les soldats sur la légitimité de l’Empereur Nicolas. Les chefs des conjurés espéraient profiter de l’erreur des troupes pour opérer, à la faveur d’une émeute de caserne, une révolution politique dont heureusement ou malheureusement pour la Russie eux seuls jusqu’alors avaient senti le besoin. Le nombre de ces réformateurs était trop peu considérable pour que les troubles excités par eux pussent aboutir au résultat qu’ils se proposaient : c’était faire du désordre pour le désordre.

La conspiration fut déconcertée par la présence d’esprit de l’Empereur[1] ou mieux par l’intrépidité de son regard ; ce prince, dès le premier jour d’autorité, puisa dans l’énergie de son attitude toute la force de son règne.

La révolution arrêtée, il fallut procéder à la punition des coupables. Le prince Troubetzkoï, un des plus compromis, ne put se justifier ; on l’envoya comme forçat aux mines de l’Oural pour quatorze ou quinze ans, et pour le reste de sa vie en Sibérie dans une de ces colonies lointaines que les malfaiteurs sont destinés à peupler.

  1. Voyez tome II, treizième Lettre, conversation de l’Empereur.