Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

jourd’hui se renouveler en Russie. Je vous ferai le résumé de sa conversation si toutefois j’en puis tirer quelque chose ; jusqu’à présent je n’ai recueilli de la bouche des Russes que des discours confus. Est-ce défaut de logique, est-ce volonté arrêtée d’embrouiller les idées des étrangers ? c’est, je crois, l’un et l’autre. À force de vouloir déguiser la vérité aux yeux des autres, on finit par ne plus l’apercevoir soi-même qu’à travers un voile qui, chaque jour, s’épaissit davantage. Aussi les Russes qui vieillissent vous trompent-ils innocemment et sans s’en douter ; le mensonge sort de leur bouche naïf comme un aveu. Je serais curieux de savoir à quel âge la fraude cesse d’être un péché à leurs yeux. La fausse conscience commence de bonne heure chez des hommes qui vivent de peur.

Rien ne se vend bon marché à la foire de Nijni, si ce n’est ce que personne ne se soucie d’acheter. L’époque des grandes différences de prix, selon les diverses localités, est passée ; on sait partout la valeur de toutes choses ; les Tatars eux-mêmes qui viennent du centre de l’Asie à Nijni pour payer très-cher, parce qu’ils ne peuvent faire autrement, les objets de luxe envoyés de Paris et de Londres, y portent en échange des denrées dont ils connaissent parfaitement la valeur. Les marchands peuvent encore abuser de la situation où se trouvent les acheteurs, mais