Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/182

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ployer avec habileté tour à tour la menace et la douceur pour tirer peu à peu des mains de l’esclave une partie des richesses qu’il n’ose lui enlever d’un seul coup ?

Il faut venir en Russie pour apprendre le prix des institutions qui garantissent la liberté des peuples, sans égard au caractère des princes. Un boyard ruiné peut, il est vrai, prêter l’abri de son nom aux possessions de son vassal enrichi… à qui l’État n’accorde pas le droit de posséder un pouce de terre, ni même l’argent qu’il gagne !!… Mais cette protection équivoque, et qui n’est pas autorisée par la loi, dépend uniquement des caprices du protecteur.

Singuliers rapports du maître et du serf ! Il y a là quelque chose d’inquiétant. On a peine à compter sur la durée des institutions qui ont pu produire une telle bizarrerie sociale : pourtant elles sont solides. En Russie, rien n’est défini par le mot propre, la rédaction n’est qu’une tromperie continuelle dont il faut se garder avec soin. En principe, tout est tellement absolu qu’on se dit : Sous un tel régime la vie est impossible ; en pratique, il y a tant d’exceptions qu’on se dit : Dans la confusion causée par des coutumes et des usages si contradictoires tout gouvernement est impossible.

Il faut avoir découvert la solution de ce double