Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/181

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chaque fois qu’une légère difficulté s’élève sur la manière de continuer une muraille, ou bien dès que l’on répare la façade d’une ancienne maison, ou lorsqu’on en veut bâtir une nouvelle dans quelque rue ou sur l’un des quais de Nijni, le gouverneur a l’ordre de faire lever un plan spécial et de soumettre la question à l’Empereur. Quel homme ! s’écrient les Russes… Quel pays ! m’écrierais-je, si j’osais parler !!

Chemin faisant, M. Boutourline, dont je ne saurais assez louer l’obligeance et reconnaître l’hospitalité, m’a donné d’intéressantes notions sur l’administration russe et sur l’amélioration que le progrès des mœurs apporte chaque jour dans la condition des paysans.

Aujourd’hui un serf peut posséder même des terres sous le nom de son seigneur, sans que celui-ci ose s’affranchir de la garantie morale qu’il doit à son opulent esclave. Dépouiller cet homme du fruit de son labeur et de son industrie, ce serait un abus de pouvoir que le boyard le plus tyrannique n’oserait se permettre sous le règne de l’Empereur Nicolas ; mais qui m’assure qu’il ne l’osera pas sous un autre souverain ? Qui m’assure même que malgré le retour à l’équité, glorieux caractère du règne actuel, il ne se trouve pas des seigneurs avares et pauvres qui, sans spolier ouvertement leurs vassaux, savent em-