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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/280

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des protecteurs, on se hâterait d’aggraver sa position en l’éloignant pour éviter tout éclaircissement et pour étouffer les plaintes : il ajouta qu’on devait donc dans l’intérêt même du patient ne le défendre qu’avec une extrême circonspection. « Si une fois il part pour la Sibérie, Dieu sait quand il en reviendra, » s’écria mon conseiller ; puis ce personnage s’efforça de me faire comprendre qu’il ne pouvait avouer l’intérêt qu’il prenait à un Français suspect, parce que, soupçonné lui-même d’attachement aux idées libérales, il lui suffirait de solliciter en faveur d’un prisonnier ou seulement de dire qu’il l’avait connu, pour faire exiler le malheureux au bout du monde. Il conclut en ces mots : « Vous n’êtes ni son parent ni son ami ; vous ne prenez à lui que l’intérêt que vous croyez devoir prendre à un compatriote, à un homme que vous savez dans la peine : vous vous êtes acquitté déjà du devoir que vous imposait ce louable sentiment ; vous avez parlé au compagnon de voyage du prisonnier, à votre consul, à moi ; maintenant, si vous m’en croyez, vous vous abstiendrez de toute démarche ultérieure, ce que vous feriez n’irait pas au but, vous vous compromettriez sans fruit pour l’homme dont vous prenez gratuitement la défense. Il ne vous connaît pas, il n’attend rien de vous, partez donc ; vous ne pouvez craindre de tromper un espoir qu’il n’a pas : moi j’aurai l’œil sur lui ; je ne dois point paraître dans