Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/286

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elles achèvent de crouler loin de la ville actuelle, qui n’est elle-même qu’une ombre et un nom. Voilà tout ce qui reste de la fameuse république du moyen âge : quelques souvenirs effacés. Gloire, puissance, fantômes rentrés dans le néant pour toujours, vous n’avez pu défendre ces murs jadis si fiers ! Où est le fruit des révolutions qui n’ont cessé d’arroser de sang cette terre maintenant presque déserte ? quel succès peut valoir les larmes que les passions politiques ont fait couler dans ce coin du monde ? Dieu nous apprend trop souvent que ce que les hommes déçus par l’orgueil regardaient comme un digne but à leurs efforts, n’était réellement qu’un moyen d’occuper le superflu de leurs forces dans l’effervescence de la jeunesse. Voilà le principe de plus d’une action héroïque !

Novgorod-la-Grande est aujourd’hui un tas de pierres qui conserve quelque renom au milieu d’une plaine stérile à l’œil, au bord d’un fleuve triste, étroit, et dont l’eau est trouble comme une saignée dans un marécage. Il y eut là pourtant des hommes célèbres par leur amour pour la liberté turbulente ; il s’y passa des scènes tragiques ; des catastrophes imprévues terminèrent des existences brillantes. De tout ce bruit, de tout ce sang, de toutes ces rivalités, il ne reste aujourd’hui que la somnolence d’un peuple de soldats languissant dans une ville qui ne s’intéresse plus à