Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/285

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souvent certains esprits tournés à l’optimisme, et d’autres qui, par intérêt, par politique ou par duperie, se font les flatteurs des masses, prennent le mouvement pour le progrès. Ce qui me paraît digne de remarque, c’est que ce sont les correspondances de Pinen l’archevêque, et de plusieurs des principaux citoyens de Novgorod avec les Polonais, qui attirèrent la foudre sur la ville où trente mille innocents périrent dans les combats ainsi que dans les supplices et les massacres inventés et présidés par le Czar. Il y eut des jours où six cents victimes furent exécutées sous ses yeux ; et toutes ces horreurs avaient lieu pour punir un crime, irrémissible dès cette époque : le crime de communication clandestine avec les Polonais. Ceci se passait il y a près de trois cents ans, en 1570.

Novgorod-la-Grande ne s’est jamais relevée de cette dernière crise ; elle aurait remplacé ses morts, elle n’a pu survivre à l’abolition de ses institutions démocratiques ; ses murailles, badigeonnées avec le soin qu’emploient partout les Russes pour effacer, sous le fard d’une régénération menteuse, les trop véridiques vestiges de l’histoire, ne sont plus tachées de sang ; elles paraissent bâties d’hier ; mais ses larges rues tirées au cordeau sont désertes, et les trois quarts de ses ruines, dispersées hors de son étroite enceinte, se perdent dans les plaines d’alentour, où