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Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/121

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vint en peu de temps à les connaître si bien, qu'il distinguait ceux de notre pays, a toutes les distances, par la forme générale, par la distribution des branches, par l'écorce et par une foule d'autres caractères auxquels les botanistes de profession ne s'attachent peut-être pas assez. Dans les courses qu'il était obligé de faire avec ses collègues, il les défiait à cette sorte d'exercice ; et à force de renchérir les uns sur les autres, on arrivait ordinairement à des questions que lui seul pouvait résoudre. Le moindre fragment de branche, le plus léger brin d'écorce, lui suffisaient pour prononcer sur l'espèce d'arbre dont ils étaient provenus.

Ce n'était cependant pas tout à fait de la botanique : un événement peu important par lui-même lui fit franchir le court intervalle qui l'en séparait encore.

Un jour qu'il se promenait au Jardin des Plantes avec ses confrères, ils s'amusèrent de nouveau à nommer les arbres qu'ils rencontraient. Ce jeu réussit assez bien pour les premiers ; ils étaient du pays : mais quand on fut au quatrième, qui était un micocoulier, personne ne le reconnut, quoique de pleine terre, et on fut obligé d'en demander le nom à un garçon jardinier.

Cette espèce d'affront essuyé par le tribunal des eaux et forêts en corps piqua au vif l'amour-propre de l'Héritier ; il sentit qu'il était honteux pour lui de ne pas connaître au moins ceux des arbres étrangers qui pourraient être naturalisés chez nous avec avantage, et il suivit un cours de botanique. C'est alors qu'il se lia d'amitié avec plusieurs botanistes célèbres dont il est devenu depuis le confrère à l'Académie et à l'Institut.