Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/394

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

partie de ses travaux, le député et le conseiller d’État était encore essentiellement membre de l'Institut. Il nous conviendrait moins de le peindre dans ses autres rapports politiques, et nous n’aurions probablement pas de notions suffisantes pour le faire avec exactitude.

Quelques-uns disent que, désirant invariablement le bien, son esprit toujours facile variait peut-être trop sur les moyens de le faire, et que l’habitude de parler avec une chaleur égale pour chacune des opinions qui s’emparaient successivement de lui, diminuait un peu l’effet naturel que son éloquence aurait dû avoir. C’est que, recherchant toujours vivement une approbation immédiate, il ne songeait point que, dans la carrière de l'ambition comme dans toutes les autres, les succès n’imposent qu’autant qu’ils ne sont point trop balancés par des échecs. Il espérait se faire pardonner une proposition hasardée, par sa complaisance à la modifier jusqu’à ce qu’on l’adoptât ; mais c’était un mauvais calcul, et la jalousie compte avec plus de soin les défaites que les victoires. Il s’aperçut à la fin que ce n’était pas d’après celles-ci que ses émules le jugeaient, et cette découverte fut pour lui un grand malheur. Toute sa vie il avait attaché à l’opinion des autres plus de prix qu’il ne convient peut-être à un savant et à un homme d’État. Et que l’on ne croie pas que, dans son besoin exagéré de ne pas déplaire, il fit acception des personnes : un mot dit sur son compte dans le moindre cercle, un article de journal avait le droit de l'inquiéter presque autant qu’une grande espérance