Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/468

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

elle tient au continent, et hérissée le long du bord opposé de montagnes qui enclosent des vallées riantes. Civilisée autrefois par des colonies grecques, occupée pendant le moyen age par les Genois, habitée ensuite par des Tartares qui avaient fini par y prendre des mœurs assez paisibles, elle était depuis peu de temps tombée sous le pouvoir des Russes. On sait avec quel appareil Potemkin avait conduit l'impératrice dans cette nouvelle conquête, et par quels prodiges de dépenses et de despotisme ce favori avait donné pour quelques jours à des déserts l'apparenee de contrées fertiles et florissantes. On dirait que M. Pallas partagea l’illusion de sa souveraine ; ou peut-etre le contraste entre les agréables vallons de la côte ouverts au midi, jouissant de la vue de la mer, plantés de vignes et de rosiers, et les tristes plaines du nord de la Russie, le frappa-t-il trop agréablement : il traca un tableau enchanteur de la Tauride[1], et la preuve qu’il était de bonne foi, c’est qu’il souhaite d'y obtenir une retraite.

Ce repos, qu’il avait fui si longtemps, lui était devenu nécessaire. Dans son dernier voyage, en voulant examiner les bords d’une rivière dont la surface était gelée, la glace se cassa sous lui, et il tomba dans l’eau jusqu’à mi-corps : loin de tout secours, par un très-grand froid, il fut obligé de se faire traîner à plusieurs lieues, enveloppé dans une couverture. Cet accident lui occasionna des douleurs qu’il espérait de voir se calmer dans un climat plus doux ; que Pétersbourg ; mais son

  1. Tableau physique et topographique de la Tauride (Nov. act. Petrop., tome X), réimprîmé à Paris en l'an XII (1800).