Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/93

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breux de l'affection ou du respect des autres, à toutes les époques de sa vie et sous les gouvernements qui se sont succédé.

On lui a reproché d'avoir souffert des hommages indignes de lui et odieux par les noms seuls de ceux qui les lui rendaient ; mais c'était une suite du système qu'il s'était fait de juger même les hommes d'État par leurs propres discours, et de ne leur supposer jamais d'autres motifs que ceux qu'ils exprimaient : méthode dangereuse, sans doute, mais que nous avons peut-être aussi un peu trop abandonnée aujourd’hui.

Une autre disposition de son esprit, qui a encore contribué a ces odieuses imputations de pusillanimité ou d'égoïsme qu'on lui a faites même dans des ouvrages imprimés, et qui ne les justifie cependant pas davantage, c'était son obéissance entière à la loi, non pas comme juste, simplement comme loi, Cette soumission pour les lois humaines était absolument du même genre que celle qu'il avait pour les lois de la nature ; et il ne se permettait pas plus de murmurer contre celles qui le privaient de sa fortune, ou de l'usage raisonnable de sa liberté, que contre celles qui lui faisaient déformer les membres par la goutte. Quelqu'un a dit de lui qu'il observait les nodus de ses doigts avec le même sang-froid qu'il aurait pu faire ceux d'un arbre, et cela était vrai à la lettre. Cela était vrai également du sang-froid avec lequel il aurait abandonné ses places, sa fortune, et se serait exilé au loin, si les tyrans l'eussent exigé.

D'ailleurs, quand le maintien de sa tranquillité aurait