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Page:Cyrano de Bergerac - Œuvres, 1676, volume 1.djvu/116

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vous, c’eſt de me déchirer ſi doucement, que je puiſſe faire ſemblant de ne le pas ſentir. Vous pouvez connoiſtre par là qu’on m’envoye la Gazette du Païs Latin ; Remerciez Dieu, de ce qu’il m’a donné une ame aſſez raiſonnable, pour ne croire pas tout le monde de toutes choſes, à cauſe que tout le monde peut dire toutes choſes ; autrement j’aurois appliqué à vos maux de ratte un plus ſolide & plus puiſſant antidote que le diſcours. Ce n’eſt pas que j’aye jamais attendu des actions fort humaines d’une perſonne qui ſortoit de l’humanité ; mais je ne pouvois croire, que voſtre cervelle euſt ſi generalement échoüé contre les bancs de la Rhetorique, que vous euſſiez porté en Philoſophie un homme ſans teſte. On auroit à la verité trouvé fort étrange, que dans un corps ſi vaſte, voſtre petit eſprit ne ſe fût pas perdu ; auſſi ne l’a-t’il pas fait longue, & j’ay oüy dire qu’il y a de bonnes années que vous ne ſçauriez plus abandonner la vie, que voſtre trépas accompagné de miracles ne vous faſſe canoniſer : Ouy, prenez congé du Soleil quand il vous plaira, vous eſtes aſſuré d’une ligne dans nos Litanies, quand le Conſiſtoire apprendra que vous ſerez mort ſans avoir rendu l’eſprit ; mais conſolez vous, vous