Page:Cyrano de Bergerac - Œuvres, 1676, volume 1.djvu/135

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que ſemblant de vivre. Il nâquit auparavant que la Mort fut faite, & la Mort à cauſe de cela n’oſeroit tirer ſur luy, parce qu’elle craint de tuer ſon Pere ; & puis même quand cette conſideration ne l’empêcheroit pas, elle le void ſi foible de vieilleſſe, qu’il n’auroit pas la force de marcher juſqu’en l’autre monde ; Et je penſe qu’une autre raiſon encore le fait demeurer debout, c’eſt que la Mort qui ne luy voit faire aucune action de vie, le prenant plutoſt pour une ſtatuë que pour un vivant, penſe qu’il eſt du devoir, ou du temps, ou de la Fortune, de le faire tomber. Aprés cela, Monſieur, je m’étonne fort que vous diſiez qu’eſtant preſt de fermer le cercle de ſes jours, & arrivant au premier poinct, dont il eſt party, il redevienne enfant : Ah ! vous vous mocquez, & pour moy je ne ſçaurois pas meſme m’imaginer qu’il l’ait jamais eſté, quoy luy petit garçon ? non, non, il ne le fut jamais, ou Moïſe s’eſt trompé au calcul qu’il a fait de la Creation du Monde : S’il eſt permis toutefois de nommer ainſi tout ce qui peut à peine faire les fonctions d’un enfant, je vous donne les mains ; car il faut en effet qu’il ſoit plus ignorant qu’une Plante meſme, de ne ſçavoir pas mourir, choſe que tout ce