Page:Cyrano de Bergerac - Œuvres, 1676, volume 1.djvu/77

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ſembloit tâcher à le faire ſortir des cernes. Aprés ce ſigne les trois ronds tournerent ſous luy. Cét autre fut ſuivy d’une grêle rouge comme du ſang, & celuy-cy fit encore place à un quatriéme beaucoup plus effroyable ; C’eſtoit un torrent de feu, qui broüiſſoit en tournant, & ſe diviſoit par globes, dont chacun ſe fendoit en éclats, avec un grand coup de tonnerre. Il fut le dernier, car une belle lumière blanche & claire, diſſipa ces triſtes Meteores. Tout au milieu parut un jeune homme, la jambe droite ſur un Aigle, l’autre ſur un Linx, qui donna au Magicien trois phioles pleines de je ne ſçay quelle liqueur. Le Magicien luy preſenta trois cheveux, l’un pris au devant de ſa teſte, les deux autres aux tempes, il fut frappé ſur l’épaule d’un petit bâton que tenoit le Fantôme, & puis tout diſparut. Ce fut alors que les Eſtoilles blêmies à la venuë du Soleil, s’unirent à la couleur des Cieux. Je m’allois remettre en chemin pour trouver mon Village ; mais ſur ces entrefaites, le Sorcier m’ayant enviſagé, s’approcha du lieu où j’eſtois. Encore qu’il cheminât à pas lents, il fut plutoſt à moy que je ne l’apperceus bouger. Il étendit ſous ma main une main ſi froide, que la mienne en demeura fort long-temps