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Abel I de Cyrano fut d’autant plus satisfait de la résolution prise par Savinien que Denys l’aîné était dans une disposition d’esprit toute différente de celle de son frère. D’un caractère sérieux et réfléchi, Denys se sentait depuis longtemps porté vers le sacerdoce. Décidé à s’y consacrer il demanda à son père de lui constituer une rente de 150 livres tournois, nécessaire aux termes des constitutions canoniques pour arriver à cette fin. Abel I de Cyrano y consentit le 2 mars 1639 (6). Le pauvre Denys ne jouit pas longtemps de cette rente ; il a dû mourir quelques mois après.

Ce n’est pas à la légère que Cyrano avait choisi la compagnie de M. de Carbon, il y était attiré par son nom de Bergerac, par son ami Le Bret et par la renommée particulière des officiers et des soldats qui la composaient. Elle se trouvait, en effet, presque entièrement formée de gentilshommes gascons qui se faisaient redouter partout à cause de leur promptitude à tirer l’épée pour les besoins de leurs contestations particulières. Cyrano ne suivit que trop cet exemple, et quoiqu’il n’eût jamais de querelle de son chef, il accepta en participation les querelles des autres et se posa en second ordinaire pour tous les duels qui avaient lieu, en quelque sorte, sous le drapeau de la compagnie. Les duels, qui semblaient à cette époque le plus prompt moyen de se faire connaître, le rendirent si fameux que ses compagnons d’armes le considéraient comme le démon de la bravoure. Le Bret en donnant ces détails ajoute « qu’il le vit, dans un corps de garde, travailler à une élégie avec aussi peu de distractions que s’il eût été dans un cabinet fort éloigné du bruit ».

La compagnie de M. de Casteljaloux fut dirigée sur la frontière de la Champagne menacée par une armée allemande. Elle se jeta dans la place de Mouzon pour la défendre contre les Croates et eut à souffrir d’un blocus