Page:Cyrano de Bergerac - L autre monde ou Les états et empires de la lune et du soleil, nouv éd, 1932.djvu/366

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Royales des routes de nos Convois, pour n’être point obligé de nous affamer et nous battre en même temps.

Il a donc assiégé Paris. Mais de quelle façon ? Comme celui qui sembloit avoir peur de le prendre ; comme un bon père à ses enfants, il s’est contenté de leur montrer les verges, et les a longtemps menacés, afin qu’ils eussent le loisir de se repentir ; et puis, à parler franchement, leur maladie étant un efiet de leur débauche, il étoit du devoir d’un bon Médecin et les obligera faire une diète (308). En vérité, s’il étoit permis de se dispenser à la raillerie sur une matière de cette importance, je dirois que la veille des Rois, le nôtre voyant dans sa Capitale tant d’autres Rois arrivés de nuit, il sortit contre eux et voulut essayer de vaincre cinquante mille Monarques.

Voilà je pense tous les chefs, par qui la canaille a tâché de rendre odieuse la personne de son Éminence, sans avoir jamais eu aucun légitime sujet de s’en plaindre. Cependant ils ne laissent pas de décrier ses plus éclatantes vertus, de blâmer son Ministère., et lui préférer son prédécesseur. Mais par quelle raison ? Je n’en sais aucune, si ce n’est peut-être, parce que Monsieur le Cardinal Mazarin n’envoie personne à la mort sans connoissance de cause ; parce qu’il n’a point une Cour grasse du sang des peuples ; parce qu’il ne fait point trancher la tête à des Comtes, à des Maréchaux et à des Ducs et Pairs ; parce qu’il n’éloigne pas les Princes de la connoissance des affaires ; parce qu’il n’est pas d’humeur à se venger ; enfin parce que même ils le voient si modéré, qu’ils en prévoient l’impunité de leurs attentats. Voilà pourquoi ces Factieux ne le jugent pas grand Politique. Ô stupide Vulgaire ! un Ministre bénin te déplaît ; prends garde de tomber dans le malheur des oiseaux de la Fable, qui ayant demandé un Chef, ne se contentèrent pas du gouvernement de la Colombe que Jupiter leur donna, qui