Page:Cyvoct - Souvenirs de madame Recamier.djvu/80

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rien n’était pourtant moins semblable que leurs caractères.

Adrien de Montmorency[1], prince, puis duc de Laval, fut celui des deux cousins que Mme Récamier connut le premier. Il avait alors trente ans ; il était grand, blond, svelte, et avait à la fois dans la tournure de l’élégance et de la gaucherie ; sa vue était très‑basse, et une sorte de bégaiement ou d’hésitation dans la parole nuisait auprès de bien des gens à sa réputation d’esprit. Il en avait pourtant ; il aimait la lecture, et jouissait vivement du plaisir d’une conversation animée, dans laquelle il apportait un contingent plein de finesse et de bonne grâce. Il y avait chez lui plus d’imagination que de sensibilité. Généreux et chevaleresque, sincèrement chrétien, mais de nature un peu mobile, d’une droiture extrême et d’une loyauté parfaite, lorsqu’il eut à remplir sous la Restauration un rôle public d’ambassadeur et de pair de France, il porta dans la chambre

  1. Anne-Adrien de Montmorency, duc de Laval, chevalier des Ordres du roi et de la Toison d’or, grand d’Espagne de première classe, né à Paris le 19 octobre 1767. Marié à Charlotte de Luxembourg, dont‑il eut trois enfants, deux filles et un fils. Henri de Montmorency. Ce fils lui fut enlevé à l’âge de vingt-trois ans, au mois de juin 1819.

    Adrien de Montmoiency fut successivement ambassadeur de France en Espagne en 1814, à Rome en 1821, à Vienne en 1828. Il fut nommé ministre des affaires étrangères en 1829, et refusa ce poste éminent. Le 4 septembre de la même année, il passa de l’ambassade de Vienne à celle de Londres.


    Il mourut le 16 juin 1887.