Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/32

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très-variés. Deux fois je l’aperçois seulement de mes fenêtres, comme il advenait chaque jour en réalité ; d’autres fois je me crois transporté dans l’atelier où elle travaille ; je la rencontre à sa porte ; je me figure qu’elle est à la campagne chez mes parents ; je cause avec elle, je la vois enfin de très-près. Partout où il est question d’elle, mon journal consigne invariablement le regret que j’ai ressenti de n’avoir pu nettement distinguer sa physionomie, qu’une gaze importune ou qu’une ombre légère semblait toujours voiler à demi.

Ailleurs, dans ce même journal de mes songes, l’image d’un vieux mendiant d’une figure étrange, qui nous avait demandé l’aumône un soir avec des paroles bizarres, est signalée comme m’étant réapparue trois fois, non sans m’impressionner assez vivement. Les songes au milieu desquels il se montre sont des plus clairs et des plus minutieusement perçus. Cependant la figure du vieux bohémien ne sort jamais de la demi-teinte. Le cliché-souvenir, demeuré confus dès son principe, ne saurait fournir une image plus nette qu’il ne le comporte, et, fût-elle appelée par l’association des idées à se produire parmi plusieurs autres d’une netteté parfaite, cette image essentiellement indécise ne ferait que mieux ressortir le contraste, si commun dans les rêves, de tableaux pleins d’une vigueur extrême à côté d’autres à peine esquissés.