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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/121

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

— Quand il sera fort ! je voudrais bien voir cette merveille-là ! Il mangera plutôt le pain de son père jusqu’à vingt-cinq ans.

— Au fait, dit Pierre Rigault, on n’en meurt pas pour se remuer un peu, tu gardais bien les vaches à douze ans, toi, femme.

— Il n’a pas douze ans, et puis, je n’avais pas de mère quand on m’a envoyé chez une fermière.

— En a-t-il une plus que toi ? reprit Pierre, Louis n’est pas ton fils après tout, vas-tu le préférer à tes vrais enfants ?

— Comment ce n’est pas ton fils ! interrompit l’oncle Thomas stupéfait, par ma foi, tu es un fameux fou de t’être chargé d’un enfant de rencontre ! N’importe, la sottise est faite, — maintenant il faut la réparer et te débarrasser au plus tôt de ce marmot-là. »

Le visage de Louise s’empourpra :

« Non mon oncle, s’écria-t-elle, non, on ne le renverra pas : c’est notre fils par le cœur.

— Écoute, après tout, femme, dit le sabotier, mon oncle n’a pas tort, depuis neuf ans nous avons assez fait pour lui, il est temps qu’il le reconnaisse…

— Plus bas, plus bas, s’il t’entendait, Pierre, dit Louise, qui croyait distinguer un léger bruit venant de la chambre voisine ; mon Dieu ! s’il t’entendait.