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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/155

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

La marquise s’arrête entre ces deux dangers ; elle regarde l’enfant avec angoisse.

« Jetez-le ! jetez-le ! » lui crie-t-on de toutes parts.

On tend des matelas pour recevoir l’enfant ; elle le jette en effet ; il est remis dans les bras d’une femme ; d’autres matelas, soutenus par plusieurs hommes, sont élevés pour la recevoir ensuite.

Elle y tombe épuisée, sans connaissance et comme sans vie.

Ce fut sans doute un beau spectacle que celui qui succéda à cette scène d’horreur. À l’éclat mourant de l’incendie apaisé, aux premières lueurs de l’aurore, six hommes chargèrent sur leurs bras vigoureux le lit formé de branchages et d’un matelas recouvert d’un drap blanc sur lequel était la marquise de Méligny. Ses beaux cheveux défaits couvraient à demi son peignoir ; son visage pâli avait un rayonnement céleste : il n’y apparaissait pas le calme de la mort, mais l’affaiblissement d’un corps mortel qui a succombé sous la volonté d’une âme divine.

Les femmes, les hommes, ses domestiques, lui formaient un cortège attendri et respectueux. Aux portes du château, on la remit entre les bras de ses femmes, qui la soulevèrent pour l’emporter dans sa chambre et la posèrent sur un lit de re-