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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/94

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

Et elle partit pour la ville.

On lui donna vingt-huit francs de ses chers trésors ; ce ne fut pas sans quelques larmes qu’elle se sépara d’eux, heureuse cependant d’en avoir trois francs de plus qu’elle ne croyait.

En revenant au village, elle entendit des cris sortir des blés qui bordaient la route ; elle s’approcha et aperçut un petit enfant de huit mois environ, enveloppé dans de misérables langes, un de ces pauvres êtres abandonnés par leur mère et condamnés peut-être à mourir sans secours. Elle s’arrêta devant cette petite créature délaissée, l’image de son Jacques, qui avait à peu près le même âge, se présenta à son esprit elle le vit là, couché, seul, en larmes, périssant de faim, sans une main secourable pour le recueillir ; son cœur s’émut à cette pensée, l’enfant lui tendit ses faibles bras comme pour implorer sa pitié.

« Non, pauvre petit ange ! s’écria-t-elle en se baissant pour saisir l’enfant, tu ne périras pas, tant qu’il restera à Louise Rigault des forces pour travailler ; elle en a élevé quatre, elle pourra bien en nourrir cinq. »

Et réchauffant contre sa poitrine le petit abandonné, la jeune femme reprit le chemin de sa chaumière.

Elle trembla un peu en arrivant. Qu’allait dire