Page:D'Ornano - Le choix d'Agnès - nouvelle canadienne inédite, Album universel, 11 août 1906.djvu/7

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échos répétaient dans les îles d’en face.

Le pont du chemin de fer Pacifique Canadien n’avait pas cessé de vibrer, jusqu’en ses assises ; un noir panache de fumée n’avait pas achevé de dérouler ses spirales sur Beauséjour, qu’un groupe de joyeux visiteurs saluaient M. Duprat et sa fille.

Tante Victoire, son mari, leurs enfants, quelques amis, d’aucuns prétendant à la main d’Agnès, parlaient tous à la fois, brodant sur le thème banal de la beauté du site, de la clémence du ciel, où un cumulus frangé d’or demeurait immobile.

Bientôt, tout ce monde, amateur de plein air, se dispersait dans les jardins, ou canotait. Monsieur Delphis Latulipe, courtier opulent, un des intimes de M. Duprat, voulant faire plaisir à ses filles : ces demoiselles, leur amie Agnès, et, le dit M. Latulipe, s’embarquaient dans une chaloupe. Il s’agissait de se rendre compte des allées et des venues d’un « habitant », qui, de l’eau jusqu’aux genoux, se promenait parmi les joncs de l’anse au Chat.


Le père Michel jetait dans une épuissette les grenouilles-taureaux qu’il empoignait.

Ce qu’il faisait, le père Michel, dont on reconnaissait maintenant l’immense chapeau couleur amadou ? Eh bien ! il cueillait flegmatiquement les basses de l’orchestre cher à Mlle  Duprat ; il jetait dans une épuisette les grenouilles-taureaux qu’il empoignait sans pitié. Et les batraciens de coasser formidablement, tandis que les jeunes filles, sauf une, (on devine laquelle), riaient follement, sans souci des convenances.

Près de l’embarcadère étaient restés MM. Phi-