monde anarchique, les amours volages sont le très petit nombre, et les amours constants, les amours exclusifs, les amours à deux, sont le très grand nombre. L’amour vagabond est la recherche de l’amour, c’en est le voyage, les émotions et les fatigues, ce n’en est pas le but. L’amour unique, l’amour perpétuel, axe de deux cœurs confondus dans une attraction réciproque, telle est la suprême félicité des amants, l’apogée de l’évolution sexuelle ; c’est le radieux foyer vers lequel tendent tous les pèlerinages, l’apothéose du couple humain, le bonheur à son zénith.
À l’heure où l’on aime, douter de la perpétuité de son amour n’est-ce pas l’infirmer ? Ou l’on doute, et alors on n’aime pas ; ou l’on aime, et alors on ne doute pas. Dans la vieille société l’amour n’est guère possible ; il n’est jamais qu’une illusion d’un moment, trop de préjugés et d’intérêts contre nature sont là pour le dissiper, c’est un feu aussitôt éteint qu’allumé et qui s’en va en fumée. Dans la société nouvelle, l’amour est une flamme trop vive et les brises qui l’entourent sont trop pures, trop selon la douce et suave et humaine poésie, pour qu’il ne se fortifie pas dans son ardeur et ne s’exalte pas au contact de tous ces souffles. Loin de l’appauvrir, tout ce qu’il rencontre lui sert d’aliment. Ici le jeune homme comme la jeune fille ont tout le temps de