Dans cette esquisse j’ai à reproduire un sujet touché de main de maître par un grand artiste en poésie. Je n’ai pas son travail sous la main ; et l’eussé-je, je relis rarement un livre, je n’en ai guère le loisir ni le courage. Ma mémoire est toute ma bibliothèque, et ma bibliothèque est souvent bien en désordre. S’il m’échappait des réminiscences, s’il m’arrivait de puiser dans mes souvenirs, croyant puiser dans mon propre fonds, je déclare du moins que ce serait sans le savoir et sans le vouloir. J’ai en horreur les plagiaires. Toutefois, je suis aussi de l’avis d’Alfred de Musset, je puis penser ce qu’un autre a pensé avant moi. Je désirerais une chose, c’est que ceux qui n’ont pas lu le livre d’Eugène Pelletan, le Monde marche, voulussent bien le lire avant de continuer la lecture du mien. L’œuvre du brillant écrivain est tout un musée du règne de l’humanité jusqu’à nos jours, magnifiques pages qu’il est toujours bon de connaître, et qui seront d’un grand secours à plus d’un civilisé, accoudé devant mon ouvrage, non-seulement pour suppléer à ce qu’il y manque, mais encore pour aider à en comprendre les ombres et les clairs.
Et maintenant, lecteur, si tu veux faire route avec moi, fais provision d’intelligence, et en marche !