nes avec les denrées de tous les climats, elle se mirait dans leur vue avec les marchandises de tous les pays. L’horizon s’était élargi. L’homme avait marché, d’abord de la famille à la tribu, puis de la tribu à la cité, et enfin de la cité à la nation. L’Asie, l’Afrique, l’Europe ne formaient plus qu’un continent ; les armées et les caravanes avaient rapproché les distances. L’Inde, l’Égypte, la Grèce, Carthage et Rome avaient débordé l’une sur l’autre, roulant dans leur courant le sang et l’or, le fer et le feu, la vie et la mort ; et, comme les eaux du Nil, elles avaient apporté avec la dévastation un engrais de fertilisation pour les arts et les sciences, l’industrie et l’agriculture. Le flot des ravageurs une fois écoulé ou absorbé par les peuples conquis, le progrès s’empressait de relever la tête et de fournir une plus belle et plus ample récolte. L’Inde d’abord, puis l’Égypte, puis la Grèce, puis Rome avaient brillé chacune à leur tour sur les ondulations d’hommes et avaient mûri quelque peu leur fruit. L’architecture, la statuaire, les lettres formaient déjà une magnifique gerbe. Dans son essor révolutionnaire, la philosophie, comme un fluide électrique, errait encore dans les nuages, mais elle grondait sourdement et lançait parfois des éclairs en attendant qu’elle se dégageât de ses entraves et produisit la foudre. Rome toute-puissante avait un pied dans
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