Page:Déjacque - L’Humanisphère, utopie anarchique.djvu/44

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la Perse et l’autre dans l’Armorique. Comme le divin Phœbus conduisant le char du soleil, elle tenait en main les rênes des lumières et rayonnait sur le monde. Mais dans sa course triomphale, elle avait dépassé son zénith et entrait dans sa phase de décadence. Sa dictature proconsulaire touchait à son déclin. Elle avait bien, au loin, triomphé des Gaulois et des Carthaginois ; elle avait bien anéanti, dans le sang et presque à ses portes, une formidable insurrection d’esclaves ; cent mille spartacus avaient péri les armes à la main, mordus au cœur par le glaive des légions civiques ; les maillons brisés avaient été ressoudés et la chaîne rendue plus pesante à l’idée. Mais la louve avait eu peur. Et cette lutte où il lui avait fallu dépenser la meilleure partie de ses forces, cette lutte à mort l’avait épuisée. — Oh ! en me rappelant ces grandes journées de Juin des temps antiques, cette immense barricade élevée par les gladiateurs en face des privilégiés de la République et des armées du Capitole ; oh ! je ne puis m’empêcher de songer dans ces temps modernes à cette autre levée de boucliers des prolétaires, et de saluer à travers les siècles, — moi, le vaincu des bords de la Seine, — le vaincu des bords du Tibre ! Le bruit que font de pareilles rébellions ne se perd pas dans la nuit des temps, il se répercute de fibre en fibre, de muscle en muscle, de généra-