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PREMIÈRE PHILIPPIQUE.

lument impossible qu’un homme exécute seul tout ce que vous désirez. Il peut bien faire des promesses, donner de belles paroles, et rejeter ensuite sur celui-ci ou sur celui-là tous les mauvais succès ; mais c’est là précisément ce qui a ruiné vos affaires. En effet, lorsque le général de ces malheureux étrangers non payés a été battu, et qu’on vient à cette tribune vous faire mille rapports infidèles de sa conduite, et que vous aussitôt, le jugeant avec la même facilité qu’on l’accuse, vous vous contentez de dénonciations vagues pour le condamner ou l’absoudre au hasard, je vous le demande, que peut-on attendre d’un semblable gouvernement ?

Quel est donc le moyen de remédier à de tels abus ? c’est que vous alliez vous-mêmes vous joindre à vos troupes pour être les soldats et les inspecteurs de vos généraux pendant la campagne, et leurs juges quand vous serez rentrés dans vos foyers. Car il ne suffit pas de savoir par ouï-dire, il faut voir de vos propres yeux ce qui se passe dans vos armées. Ceux qui les commandent ont tellement perdu tout sentiment d’honneur, qu’ils s’exposent deux ou trois fois à perdre la vie par le jugement de leurs concitoyens, et qu’ils n’osent pas s’exposer une seule fois à la perdre dans un combat contre l’ennemi ; ils préfèrent la mort des voleurs et des brigands à celle des guerriers ; car un malfaiteur doit mourir par la main du bourreau, mais un général, par celle de l’ennemi.