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SOMMAIRE.

qu’ils doivent songer a secourir leurs alliés, et non à attaquer Philippe ; il leur conseille de profiter de l’occasion qui se présente, et qui est la plus favorable qu’ils puissent désirer. Il leur indique les fonds sur lesquels ils pourraient prendre de quoi fournir aux dépenses nécessaires : c’est une matière délicate qu’il traite avec beaucoup d’adresse. Il les anime contre Philippe, les excite par le sentiment de la honte, de la crainte, de la gloire, par l’exemple de leurs ancêtres : il finit par exposer les désordres de leur gouvernement, et les moyens d’y remédier.

J’ai dit que l’article des fonds que Démosthène indique, était une matière délicate : en voici la raison.

Quand les Athéniens, à la fin de la guerre d’Egine, eurent fait une paix de trente ans avec les Lacédémoniens, ils résolurent de mettre en réserve, dans leur trésor, mille talens chaque année, avec défense, sous peine de mort, qu’on parlât jamais d’y toucher, à moins qu’il ne s’agît de repousser les ennemis qui tenteraient d’envahir l’Attique. Cette loi s’observa d’abord avec beaucoup d’exactitude. Périclès ensuite, dans le dessein de faire sa cour au peuple, proposa de distribuer aux citoyens un certain nombre d’oboles les jours qu’on célébrerait des jeux et des sacrifices, et de payer à chacun une certaine rétribution pour le droit de présence, dans les assemblées où l’on agiterait les matières d’état, sauf à reprendre en temps de guerre les fonds sur lesquels on ferait ces distributions en temps de paix ; mais le peuple y prit un tel goût, qu’il ne voulut plus qu’on les retranchât en aucun temps. On alla plus loin : on établit qu’on emploierait les mêmes fonds à toutes les dépenses qu’entraîneraient les jeux ; il fut même défendu, sous peine de mort, de proposer en forme de les rendre à leur première destination. Cette folle dissipation eut d’étranges suites. On ne pouvait la réparer que par des impositions dont l’inégalité arbitraire perpétuait les querelles