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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

plus de zèle, qui s’oppose avec le plus d’ardeur à ceux qui la trahissent, ce citoyen, Eschine, vous procure à vous-même, traître et mercenaire, les moyens de continuer vos criminels trafics. Et c’est, je puis le dire, c’est parce qu’il est un certain nombre de ces amis de l’état, qui combattent sans cesse vos projets, que vous subsistez encore, et qu’on vous paie ; vous auriez péri, il y a long-tems, s’il n’eût tenu qu’à vous.

Je suis loin d’avoir épuisé tout ce qu’on pourrait dire sur les événemens dont je parle ; mais je crois en avoir déjà trop dit. Au reste, il faut s’en prendre à ce méchant homme qui, se déchargeant sur moi de ses iniquités, aurait voulu me souiller de ses propres noirceurs, et qui, par là, m’oblige à me laver auprès de nos jeunes citoyens qui sont nés depuis ces événemens. J’ai pu fatiguer la plupart de ceux qui m’écoutent, et qui connaissaient sa perfidie mercenaire, avant même que j’eusse dit un mot. Il la décore néanmoins du nom d’amitié ; lui qui me reproche l’amitié d’Alexandre[1], disait-il dans un endroit de son discours, ce sont ses propres termes… Moi, vous reprocher l’amitié d’Alexandre ! D’où l’auriez-vous acquise ? comment l’auriez-vous méritée ? Non, je ne vous nommerai jamais l’ami ni de Philippe, ni d’Alexandre : je ne suis pas assez insensé ; à moins qu’il ne faille nommer amis de ceux qui les paient, les moissonneurs et autres mercenaires qu’ils tiennent à leurs gages.

  1. Ce sont les propres paroles extraites du discours d’Eschine : on peut les voir dans le discours même, page 76.