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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

Mais, je ne l’ai pas fait ; j’étais bien éloigné de le faire. Mercenaire aux gages de Philippe, d’abord, et maintenant d’Alexandre, c’est le nom que je vous donne, que vous donne ce peuple. Si vous en doutez, demandez-le à lui-même, ou plutôt je vais le demander pour vous… Athéniens, pensez-vous qu’Eschine soit l’ami ou le mercenaire d’Alexandre ? Vous entendez ce qu’ils disent[1].

Je vais à présent me justifier sur le fond même de l’accusation, et entrer dans le détail des actions de ma vie, afin qu’Eschine, quoiqu’il ne l’ignore pas, entende, néanmoins, à quel titre je prétends mériter le décret porté en ma faveur, et de plus grandes récompenses encore. Greffier, prenez l’acte d’accusation, et faites-en lecture.

Acte d’accusation.

Sous l’archonte Chéronide, le sixième jour du mois de mai, Eschine, fils d’Atromète de Cothoce, a cité, devant l’archonte, Ctésiphon, fils de Léosthène d’Anaphlyste, pour avoir proposé un décret contraire aux lois. Ce décret porte qu’on accordera à Démosthène, fils de Démosthène, de Péanée, une couronne d’or, qui sera proclamée, sur le théâtre, aux grandes fêtes de Bacchus, le jour des nouvelles tragédies[2] ; que le peuple couronne Démosthène, fils de Démosthène, de Péanée, à cause de sa vertu et de sa fermeté courageuse, à

  1. Après que les Athéniens ont répondu tout d’une voix, qu’Eschine est un mercenaire, Démosthène reprend, en lui adressant la parole à lui-même : Vous entendez ce qu’ils disent. Il fallait être bien sûr de son éloquence et de son pouvoir sur les auditeurs pour risquer une telle interrogation. Bemarquons que l’orateur ne se hasarde à la leur faire, que quand il a enflammé et embrasé leurs cœurs par la sortie la plus vive contre les traîtres, et que par-là il les a disposés à répondre suivant son désir.
  2. Aux grandes fêtes… Voyez plus haut, p. 239, note 17.