de ne pas devoir une grâce à la bassesse ni à la
flatterie, et d’être honoré parmi des concitoyens
qui nous estiment. Quelques faveurs qu’on reçoive
d’un maître, vaudront-elles jamais l’avantage d’être
considéré par des hommes libres, nos égaux ? Dans
les autres états, la grandeur du bienfait ne peut
équivaloir à la crainte de le perdre ; mais chez vous
on jouit avec assurance de ce qu’on a reçu ; on en
jouissait du moins par le passé. Ainsi, une loi qui
ôte la sûreté aux grâces que notre ville accorde,
leur ôte ce qui seul leur donne un plus grand prix.
Et en général, dans un état quelconque, priver de
leur récompense les défenseurs zélés du gouvernement,
c’est priver l’état lui-même de sa plus grande
ressource.
Leptine vous dira peut-être, pour vous faire prendre le change, que les charges tombent maintenant sur des hommes pauvres, et qu’en vertu de sa loi, elles seraient portées par les plus riches. Cette raison est spécieuse ; mais, si on l’examine de près, on verra qu’elle est peu solide. Les charges pour lesquelles on peut obtenir les exemptions que veut abolir Leptine, peuvent tomber, ou sur les citoyens, ou sur les étrangers. Par rapport à celles qui concernent la guerre, et qui importent au salut de la république, les contributions des biens et les armemens de vaisseaux, il est sagement et justement établi, par les anciennes lois, que personne n’en sera exempt, pas même ceux qui sont exceptés