Page:D’Argens - La philosophie du bon sens.djvu/40

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qu’il ſe ſoit fait dans la République des Lettres, je ne crois pas que ſes plus zélez Partiſans veuillent perſuader les Hommes, qu’il doive jouïr de cette Infaillibilité, que ſes Confreres[1] ont refuſé d’accorder au Pape. Et certes, je crois, que tous les Savans, & ceux qui font Profeſſion d’aimer les Belles-Lettres, ſont auſſi intéreſſés à ſoutenir leur Indépendance & leur Liberté, que les Parlemens & les Evêques le ſont à conſerver les Privilèges de l’Egliſe Gallicane. Ainſi, après avoir rendu au Pere Mallebranche la Juſtice qu’il mérite ; après avoir dit, que c’eſt un Philoſophe de la prémiere Claſſe, qu’il a le Génie grand, vaſte, pénétrant ; j’ajouterai, qu’il a fait une Critique pitoïable des Eſſais de Michel de Montagne. Le Mot de pitoïable paroîtra outré à bien des Gens. Mais, il convient ſi parfaitement, & forme une Epithete ſi juſte, qu’en vérité je crois devoir ne pas l’effacer. Le P. Mallebranche n’a pas été le ſeul qui ait attaqué Montagne : tout le Parti Janſeniſte aſſemblé vouloit l’accabler ; & il faut que ſes Ouvrages ſoient auſſi bons qu’ils le font, pour avoir réſiſté à tant de Critiques réïtérées.

  1. Les Peres de l’Oratoire.