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L’ENFANT

L’enfant se levait, saluait les dames.

— Sai (Viens.)

Et sur un escabeau sans nappe, il allait manger aux pieds de la reine quelque bouillie gasconne, les choux de la garbure ou le maïs des armottes, et frotter son bœuf dans le sel.


Lorsque son entendement et sa mémoire furent un peu plus développés, au moment où ses regards, inhabiles encore, s’essayaient à des voyages, par delà l’horizon de Pau, vers le monde des hommes et des idées, le groupe des éducatrices, insensiblement, passa aux connaissances particulières ; après l’éternel vint le spécial, à l’univers succéda le pays, avec son défilé de provinces, de villes, de villages, de bourgs, de hameaux, de fleuves, de ruisselets. L’histoire et la géographie, par images, s’animèrent en cris de combats, en trots de coches, en rumeurs de marchés, en rires de festailles. On lui dit que la France, riche en pain et en hommes, était « un pré qui se tondait trois fois l’année », qu’il la fallait « avoir pour amie, non pour voisine », et que « noble n’était en France que pour la guerre ». Elles avaient d’absolues sentences qui contaient, mieux qu’aucune histoire, la patrie, des mots clairs, nets et logiciens qui portaient le manteau, la canne, marchaient comme un parlement, des phrases audacieuses qui semblaient brandir la hallebarde, d’alertes comme des dames qui brillaient et sentaient, d’autres plus pesantes, au